À quoi faut-il être particulièrement attentif du point de vue médical quand un jeune commence le triathlon ? Et quand il pratique ce sport à haut niveau ?
Dans le premier cas, pour un jeune qui commence le triathlon il s’agit surtout de gérer la progression des activités et le triathlon constitue une activité de choix parce qu’elle varie les sports et c’est ce qu’on essaye de recommander régulièrement pour les jeunes sportifs, on parle là dès l’âge de 5-6-7 ans quand les sports peuvent être vraiment commencés de manière un petit peu structurée avec des entrainements. On s’assure donc d’une progression et d’une bonne variété dans les charges d’exercices et bien sur les premières années visent à l’apprentissage du mouvement, de la technique, avant de développer progressivement des aspects plus spécifiques de la puissance, de la force et de l’endurance. La première focalisation dans les jeunes années doit clairement être sur le plaisir et le partage dans la participation et non sur la performance.
Deuxièmement, quand un jeune pratique ce sport à haut-niveau, on doit bien respecter et il s’agit là des entraineurs mais aussi des parents, les stades de développement biologique, notamment les zones autour de la puberté dont les âges peuvent beaucoup varié d’un enfant à l’autre, bien que classiquement les filles ont 1 à 2 ans d’avance sur les garçons mais il peut y avoir facilement 3 à 4 ans d’écart entre 2 jeunes garçons ou 2 jeunes filles dans les stades de puberté. Ce qui est important c’est que ces périodes là constitue des risques de blessures plus importants principalement pour les blessures de surcharge c’est à dire tout ce qui touche les douleurs de survenue progressive, principalement aux épaules, aux genoux, aux talons, aux hanches éventuellement. Le dos clairement doit être respecté et toute douleurs au dos chez un jeune athlète qui s’entraine régulièrement ne doit pas être banalisée et doit être évaluée assez rapidement. La durée d’entrainement et le nombre d’heures qu’on peut faire par semaine est un débat assez important, en gros, on retient que plus d’heures d’entrainement par semaine que l’âge de la personne ce serait un mauvais équilibre et on serait du côté de trop d’entrainement. Donc concrètement, à 12 ans si on fait 12h d’entrainements/semaines on est à peut près à la limite. Ces principes sont en général assez bien respectés dans le triathlon mais se n’est pas le cas dans beaucoup de sports. La durée d’entrainement spécifique dépend clairement du contenu de l’entrainement, on peut faire des séances assez longues qui vont durer de 2 à 3h mais si l’intensité est légère où s’il y a une variété dans la séance d’entrainement cela n’est pas un problème. Toutefois il faut savoir que le temps d’attention et de focalisation sur l’apprentissage de nouveaux gestes, nouvelles techniques (par exemple en natation) ne peut être soutenu pendant très longtemps et là il faut éviter les séances de plus d’1/2h qui sont à des composantes très techniques ou difficile sur le plan cognitif.
Pour la distance de course et à partir de quel âge on peut le faire ici aussi le débat faire rage, la structure de course actuelle au niveau compétitions officielles me paraît assez bonne en réservant les distances olympiques dans les phases post-maturation. Pour ce qui est de la participation dans les épreuves de longues distances, notamment l’Ironman, un des éléments clef est le temps nécessaire dans la progression de l’entrainement et des volumes d’entrainement au fil des année, si on respecte une progression sain en évitant des blessures, on peut imaginer arriver dès l’âge de 17-18 ans à des volumes d’entrainements suffisants pour faire un Ironman. Toutefois ce n’est pas quelque chose que nous recommanderions sur le plan médical et sportif surtout parce que l’Ironman représente un apprentissage relativement long et les temps de récupération peuvent être importants. La thématique est surtout celle de la surcharge de partie du corps qui sont encore en développement ou dont la résistance musculaire et articulaire bénéficiera encore de période d’entrainement.
Y-a-t-il des blessures typiques que l’on retrouve plus chez les jeunes que chez les adultes ?
Principalement chez les jeunes on aura des blessures liées au développement biologique des structures cartilagineuses, osseuses et notamment au niveau des talons, des genoux ou des hanches. Il s’agit des zones d’insertion des tendons, ce qu’on appelle les apophyses et ces endroits peuvent subir des tensions ou des charges répétées entrainant des douleurs et possiblement des irrégularité dans la formation de ces structures osseuses liées à la pratique de l’activité trop intensive. On retrouve ce genre de blessure également de surcharge au niveau du dos sous forme de fissure ou ce qu’on appelle des fractures de fatigue de la colonne vertébrale plus fréquemment chez les jeunes athlètes en croissance. Ces blessures sont beaucoup liées à la quantité d’entrainement et au type d’entrainement qui est inadapté avec des éléments trop explosifs demandant trop de force donc trop de traction sur ces insertions tendineuses et osseuse, et le point essentiel est de gérer ces charges, de diminuer la quantité d’entrainement et de modifier ce qu’on fait dans l’entrainement en éliminant certains gestes ou certaines demandes physiques qui sollicitent plus ces structures-là. C’est la partie d’apprentissage qui est la plus difficile à transmettre aux jeunes athlètes mais parfois également qui est difficile à gérer pour les entraineurs dans des groupes d’entrainement. Une autre blessure qu’on ne doit pas négliger tant chez l’adulte que chez le jeune, mais surtout chez le jeune, c’est la commotion cérébrale. Une chute à vélo même avec un casque peut entrainer une commotion cérébrale avec des symptômes prolongés, des maux de tête, des difficultés de concentration, des problèmes à l’école, et il est impératif d’observer une période de repos pouvant aller de 1 à 2 semaines initialement et d’avoir un suivi médical.
Est-ce que la musculation ou la physio sont des choses aussi utile pour les jeunes ? Et les compléments en protéines ou en fer ?
Pour ce qui est de la musculation, le développement d’un jeune athlète dans tous sports nécessite le développement de la musculature tant d’un point de vue de force que d’endurance de force ou de coordination musculaire. Ces éléments là se développent avec l’entrainement classique (natation, vélo, course à pied) mais on peut améliorer notamment la coordination entre les différents muscles par des exercices spécifiques de musculation, le tout sera de progresser dans la difficulté et le poids imprimé lors de ces exercices avec un coaching qui est conscient des limitations de l’athlète en développement. On doit donc proscrire l’activité de musculation avec des altères classiques sans supervision, par contre elle n’est pas impossible s’il y a une éducation et une progression correcte. On privilégiera les activités avec le poids du corps, nécessitant un contrôle de l’équilibre, et les activités avec des élastiques par exemple. Pour ce qui est de la physiothérapie, c’est une façon aussi d’aborder le contrôle du mouvement et d’améliorer celui-ci, on aura fréquemment recours au physiothérapeute dans les phases de croissance des jeunes athlètes en raison des blessures de surcharge pour pouvoir faire un travail spécifique de renforcement et de rééducation et aussi intégrer une composante d’éducation de ces exercices-là.
Quant aux compléments de protéine ou de fer: les protéines ont un rôle dans la régénération musculaire et dans le soutien à l’activité musculaire. On peut les utiliser en récupération après les entrainements ou avant le sommeil pour stimuler la synthèse protéique et donc la récupération. Toutefois, il n’est absolument pas nécessaire d’utiliser des compléments car les aliments permettent un apport protéiné clairement suffisant et ils n’ont pas de désavantages par rapport aux protéines en complément Donc systématiquement nous privilégierons un équilibre alimentaire avec si nécessaire une bonne adaptation de la quantité de protéine par les aliments au bon moment de la journée. Pour ce qui est du fer, on se retrouve effectivement souvent avec des situations de réserve diminuée de fer, le sport en consomme un peu plus mais surtout c’est la croissance chez les jeunes qui fait que les réserves en fer peuvent diminuer et nous le contrôlons régulièrement, toutefois il faut noter que par le passé on donnait beaucoup plus de fer que maintenant, on a revu les valeurs souhaitées chez les jeunes athlètes à la baisse récemment avec la Société Suisse de Médecine du Sport, et je constate malheureusement trop souvent des suppléments de fer qui ne sont pas nécessaire alors qu’ils peuvent avoir un effet délétère sur le plan digestif, ils sont mal tolérés et peuvent causer des douleurs abdominales. Si on doit les compenser on essayera des formes de gouttes ou de comprimés dans un premier temps.
Est-ce qu’il est recommandé pour les jeunes de faire des contrôles médicaux ou des bilans sanguins point d’interrogation ou des contrôles cardiaque ? Ou des tests d’effort ? Si oui à quelle fréquence ?
Avec tous les cadres d’entrainement régulier que nous suivons, régionaux ou nationaux nous recommandons et faisons la plupart du temps une visite médicale annuelle de contrôle. Cette visite qui dure en générale 1h permet de faire le tour de la pratique sportive, de la fatigue et de la récupération, de l’intégration des activités scolaires avec le sport pour évaluer toute surcharge d’activité. On s’intéresse également aux questions de maladie éventuelle ou problème de blessure en cours, aux maladies dans la famille qui pourraient être génétiquement présentes, et on fait un examen complet du plan articulaire, le dos, le cœur, les poumons, le système nerveux, bref un examen complet. Dans ceci, l’évaluation du cœur est primordiale, on veut en effet tenter de dépister une éventuelle irrégularité cardiaque que se soit à l’auscultation du cœur ou en pratiquant un électrocardiogramme de repos dès l’âge de 14 ans. Les bilans sanguins sont réalisés aussi 1x/année selon le niveau d’entrainement on va le répéter une 2ème fois dans l’année notamment pour les taux de fer, s’assurer qu’il n’y a pas d’anémie qui pourrait découler d’une baisse des réserves de fer ou bien d’autres raisons. Les tests d’effort ne sont pas nécessaire dans l’évaluation habituelle, seulement s’il y a des difficultés qui sont manifestées à l’effort (respiratoires ou des malaises), et l’objectif est de voir si le corps fonctionne bien dans des situations d’effort. Pour ce qui est des tests à visée de performance, on peut évaluer la progression de la performance par des tests d’effort.. Dans ces cas-là, pendant les phases de développement du jeune athlète on peut le faire 1x/année ou une 2ème fois dans l’année pour voir la différence avec les périodes entre le début de saison et le milieu de saison en phase de pré-compétition pour s’assurer de l’effet favorable de l’entrainement. Dès que nous arrivons dans les cadres élite, il y a différents types de tests qui peuvent se pratiquer pour évaluer la performance mais il faut garder à l’esprit que la performance ne s’effectue pas au laboratoire mais dans la compétition, et que le laboratoire a toujours de la difficulté à reproduire les conditions de la compétition surtout en triathlon où on doit enchaîner des disciplines tandis que les tests se font un test à la fois. Ils permettent toutefois d’avoir des pointages sur la progression de l’athlète et permettent aussi d’évaluer dans une certaine mesure le potentiel d’un jeune athlète